lundi 17 octobre 2011

Episode 3

Lundi 15 Novembre 2010

Chers tous,
Déjà deux semaines ont passé et encore plein de nouvelles aventures.
Je réalise tout d'abord que je ne vous ai pas parlé de là où j’habite. Avec Bjørn-Håkon, on habite dans le quartier chic d’Oslo. Ben oui ! On a fait une école de commerce, quand même. Mais quelle ne fût pas ma surprise quand, en arrivant, j’ai réalisé qu’une personne sur deux dans la rue parlait français.
Horreur : on habite en fait à cent mètres du lycée français d’Oslo, qui attire une certaine faune d’expatriés qui n’est pas dans le besoin, croyez-moi.
Ces gens vous diront que «La vie en Norvège est formidââââble, avec une qualité de vie remarquâââble", ou encore que "Pierre-Emmanuel-Victor et Virginie-Quentin-Isabellle-Claire-de-camembert-de-calvados-de-lâche-moi-la-grappe adôôôrent faire des bonhommes de neige après la messe (NDLR : au mois d’août)".
Merde alors, moi qui croyais avoir mis quelques milliers de kilomètres entre moi et la plaine Monceau, et sa population très endogame et parfois un tout petit peu agaçante ! Me voilà emménageant à Montorgeuil, et me baignant dans la population de St Eustache.
Sinon, pour favoriser mon intégration, je prends des cours de norvégien.
Si certains disent :
_ « Oh, la langue d’Ibsen, passionnante mais qui doit être bien difficile »
 d’autres, plus lucides, me disent
_ « T’as fumé ou quoi ? C’est la langue la moins utile du monde. »
Alors, certes, il n’est pas nécessaire d’être fluent norvégien pour rentrer à l’ONU, mais le norvégien n’est pas non plus un challenge. C’est en fait un peu comme l’armoire IKEA, tu as déjà tous les morceaux pour la construire. En effet, pour citer Coluche, « tu as déjà entendu parler un scandinave? Non, ben c’est comme un allemand qui parle sous l’eau », le norvégien est bien une sauce d’anglais, d’allemand avec un peu de français, le tout parlé par des gens dont on a l’impression qu’ils viennent de se faire opérer des dents de sagesse.
Voici un exemple :
Jeg vil gå til en åpen indisk restaurant i gaten, skal du komme med meg, seriøst?
= Je will go to un open indien restaurant in gate, shall du kommen mit me, sérieux?
Et hop, vous voyez, le tour est joué. Sacrés vikings, ils allaient quand même pas nous la faire.
Allez, pour les plus téméraires, je joins un petit jeu à cet épisode, pour une leçon-minute de norvégien dans les transports en allant au travail. Envoyez vos réponses à jeuconcours@vikingenherbe.no, et  gagnez la compile best of 1880-2010 des chants folkloriques de Noël des îles Lofoten, youpi !

Reliez les phrases 1 2 3 avec les traductions A B C
1. Jeg kommer fra Frankrirke.                          A. Quand-est-ce qu’il va s’arrêter de neiger, bordel ?
2. Jeg liker Norge!                                           B. Quel prix scandaleux pour louer un renne, Knut !
3. Og en akkavit til ! SKÅL !                              C. Il court, il court le furet (contrepet fortuit)


En revanche, côté prononciation, ils craquent. Ils appuient sur certaines consonnes comme des sourds et en font durer d’autres, si bien que la première fois qu’un Norvégien vous parle, vous êtes sacrément surpris par l'aspect chaotique de la musique des phrases. C'est limite si vous vous demandez si on vous demande de l'aide pour trouver les toilettes en urgence, alors qu'en réalité on vous souhaite la bienvenue en Norvège. (Et alors quand un Danois vous salue, vous vous demandez carrément si on vous demande d’appeler la Croix Rouge).
Et puis surtout, il y a en Norvège 4,9 millions d’habitants et 5 millions de dialectes, deux langues norvégiennes écrites (mucias gracias, je préfère vous dire direct que j’en apprends qu’une, faudrait songer à pas se foutre du monde non plus) et trois langues officielles : les deux norvégiens + la langue des lapons : le sami. (Si j’ai fumé de vouloir apprendre le norvégien, je suppose que les gens qui souhaitent apprendre cette langue sont dans un délire petites pilules…)
Les Norvégiens, bien qu’habitant dans le pays le plus riche et le plus éduqué du monde, n’abandonnent jamais leur dialecte natal. Quelque soit leur niveau d'éducation, ou le poste qu'ils occupent, ils continuent de parler en patois. C’est comme si votre boss vous disait « Beh, tu vas nous chio une analyse, boudi ! » ou que Delanoë parlait comme Francis Cabrel. Mais en plus d'un dialecte à l'autre, la grammaire peut différer beaucoup. C'est donc comme si Sarko disait : « Viens faire toi-même la mélange sur les couleurs dans la changemengg de la gouvernemengg »
C'est là que t’as envie de leur dire « Mais avec tout l’argent du pétrole, vous pourriez pas pondre un Bescherelle ? » 
Mais eux, au contraire, ils sont fiers de leur dialecte et trop contents d’expliquer qu’ils viennent d’une petite ville du Buskerud qui s’appelle Ål (si, si). Ou mieux, d’une île dont tu ne savais meme pas l'existence. Le plus rigolo, c’est de voir deux personnes qui se voient pour la première fois et se rendent compte qu’elles parlent le même patois. Alors là, ça y va, le rythme de la conversation s'accélère, d'un point de vue extérieur on a l'impression que c'est tout le catalogue IKEA qui y passe : rrdkdrnråå and co.
En ce qui me concerne, j’ai appris le norvégien avec Bjørn-Håkon. Du coup, je parle la langue de Molière dans la ville de Bjørn-Håkon, et à Oslo celle de Sébastien Chabal.     
La semaine dernière, pour mon cours de norvégien, on avait des exos à faire, des trucs bien intellos pour apprendre la grammaire, le genre d’exos qu’on se tapait dans le passeport de vacances entre le CE1 et le CE2. Bjørn-Håkon avait proposé de m’aider, je suis ainsi arrivée en cours avec des phrases comme ça :
« Sur toutes les lundis dans cette hiver, nous aurons froid en les petites pieds, de la gel plein la slippo, et on devra se raper les grosses coucougnous sur la banquise pour se les réchauffer. »
Et beh, c’est 4/10 qu'il s'est tapé, Bjørn-Håkon, à l’exo du cahier de vacances.
Mais ça va, ma voisine avait :
« Toutefois les lundis sous cet hiver, nous aurons froid pendant les petites pieds, et pour éviter d avoir de la gel partout les grosses roubignons râpées jusqu’à la banquise et de devoir se les réchauffer sous longtemps dans la slippo. »
parce que son copain il vient du cercle polaire, et ben lui, il s’est pris un 0.
Le prof, qui a une tête d’anglais mais (nous voilà rassurés) s’appelle Lars Olav et est norvégien 100% saumon, avait l’air un peu au bout du rouleau. Les copains du cours aussi. Ils viennent d’Inde, de Somalie, de Pologne, d’Espagne, de Macédoine. Je peux vous dire que parler en norvégien ensemble, ça vous fout un peu le vertige.
La macédonienne, une femme d’1m cube qui a pas l’air commode du tout, me met le grappin dessus à chaque fois. Sur le ton d’un interrogatoire d’Europe de l’est, elle me pose des questions du genre : « Comment tu es rentrée dans la MAFIA DE L ALKKOOL ??? »,
« euh, j’ai postulé en ligne. »
« Mais tu parlais NORVEGIEN ? Parce que le seul mot en macédonien qui est le même qu’en norvégien c’est TRAKTOR »
En effet, ça doit pas être pratique pour demander son chemin dans Oslo.
Enfin, je ne saurais pas vous dire à quel point ils sont au taquet sur Noël. Le deux novembre, un collègue est arrive déguisé en Père Noël. La semaine dernière, on a prévu d’organiser le dîner de Noël fin novembre. J’ai failli leur dire qu’on était en plein craquage mais comme ça veut dire qu’on a commencé à commercialiser la bière de Noel, j’ai finalement accepté d’adopter ce calendrier.

Le bécot à tous,
Martine

1 commentaire:

  1. Youhouuuuuu super Cissou, tu as tes deux premiers membres publics :-)
    A très vite belle Martine !
    Pilou

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